Origines.
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Le temps de Noël
Les fêtes de Noël et de l'Épiphanie.
Les origines.
L'Eglise primitive n'a connu qu'une fête le jour du Christ Kyrios, la Pâque hebdomadaire et annuelle. Ce n'est qu'au cours du IV° siècle qu'est apparue la solennité de la venue du Seigneur parmi les hommes. Il s'agissait alors moins de commémorer un anniversaire au sens strict que de combattre les fêtes païennes du solstice d'hiver, célébrées à Rome de 25 décembre et en Egypte le 6 janvier. La fête du Natale du Christ Soleil, de son Épiphanie, fut accueillie avec d'autant plus de ferveur par les Églises qu'elle constituait, face à l'hérésie arienne, une proclamation du dogme de Nicée.
Les deux fêtes chrétiennes du solstice d'hiver.
La fête de Noël apparaît, pour la première fois, dans le Chronographe de 354. Après avoir indiqué au 25 décembre dans son calendrier civil le Natalis invicti, il annonce en tête de la Depositio martyrum : VIII Kal. Ianuarii natus Christus in Bethleem Iudea. Comme la Depositio martyrurn a dû être rédigée en 336, la célébration de Noël à Rome remonte donc aux alentours de 330. Contemporaine de la construction de la basilique constantinienne de Saint-Pierre, elle semble s'être primitivement localisée au Vatican, dirigeant vers le Christ les hommages que le peuple romain venait rendre sur la même colline aux divinités d'Orient. Le choix de la date et du lieu, les allusions explicites des Pères au symbolisme du Christ soleil de justice (Mal 4, 2) et lumière du monde (Jn 8, 12) ne nous permettent pas de douter de l'intention qui fut celle de l'Église : opposer une fête chrétienne à celle du Sol invictus, qui était le symbole de l'ultime résistance du paganisme 4. Il se trouvait d'ailleurs que l'institution d'une fête du Natale Christi au jour du Natalis Invicti rejoignait la grande idée syncrétiste de Constantin : l'empereur, qui avait décrété en 321 la fériation du premier jour de la semaine (à la fois jour du Soleil et jour du Seigneur), ne pouvait que favoriser la rencontre des fidèles des deux cultes dans la célébration annuelle du même jour.
La fête de l'Epiphanie, dont le nom atteste l'origine orientale, correspond à la même intention de l'Église. Le 6 janvier était consacré, en Egypte et en Arabie, aux fêtes du solstice, l'hommage rendu au Soleil victorieux s'accompagnant d'évocations mythologiques qui venaient du fond des âges. Dès les années 120-140, la secte des Gnostiques tenta de christianiser ces croyances : les adeptes de Basilide, écrit Clément d'Alexandrie, fêtent aussi le jour du baptême de Jésus et passent toute la nuit précédente en lectures. Selon eux, ce fut l'an XV de Tibère, le 15 - ou selon d'autres le 11 - du mois Tubi [10 ou 6 janvier].
C'est parce que, selon la gnose, l'incarnation du Verbe en l'humanité de Jésus eut lieu lors du baptême du Jourdain que les disciples de Basilide célébraient ainsi ce mystère, mais la date choisie était riche de symbolisme. L'Église catholique devait pourtant attendre le IV° siècle pour y fêter l'Épiphanie du Seigneur. Bien que la fête soit née en Orient (et sans doute en Égypte), c'est en Gaule que nous en trouvons la première attestation : l'Épiphanie était déjà une grande fête en Gaule en 361, puisque, au témoignage d'Ammien Marcellin, l'empereur Julien, gagné intérieurement au paganisme, fit encore profession extérieure de christianisme en se rendant à l'église "au jour du mois de janvier que les chrétiens célèbrent sous le nom d'Épiphanie". Pour que l'Épiphanie orientale fût traditionnelle en Gaule vers 360, ses origines doivent être à peu près contemporaines de celles de la Noël romaine. S'il faut parler d'antériorité de l'Épiphanie par rapport à Noël, on ne saurait de toute façon remonter bien loin avant le Concile de Nicée (325).
Le contenu de Noël et de l'Epiphanie.
Les termes de Natale et d'Epiphania projettent déjà quelque lumière sur le contenu respectif des solennités chrétiennes du 25 décembre et du 6 janvier. Natale veut dire anniversaire de la naissance et il était, au IV° siècle, d'un usage courant. Mais l'étiquette de cour avait élargi la signification du mot et l'avait appliqué également aux jours qui marquaient la glorification de l'empereur, comme ceux de son accession à la pourpre et de son apothéose. Telle était la signification plénière du Natalis Invicti du Soleil et de sa divinité. Alors que les chrétiens des premiers siècles avaient attribué la dénomination au jour de la vraie naissance d'un baptisé, celui de sa mort terrestre et de son entrée dans 1a Terre promise, c'est évidemment par référence à la signification païenne qu'ils l'appliquèrent au Christ Sol oriens. Et de ce fait, le Natale latin est assez proche de l'Epiphania orientale. Les plus anciennes traductions qui ont été données du terme grec expriment toute la richesse de son contenu : manifestatio, apparitio, adventus. En effet dans le monde gréco-romain on appelait epiphania aussi bien l'apparition ou la manifestation secourable de la divinité envers les hommes que les avènements festifs d'un souverain (accession au trône, entrée triomphale dans une ville). L'apparitio du premier avènement et l'adventus du second traduisent le même mot grec d'épiphanie. Or la liturgie romaine lit ce passage de la Lettre à Tite à la messe nocturne de Noël, tandis que la liturgie ambrosienne le réserve pour le 6 janvier. Ce simple fait révèle la complémentarité, l'intime compénétration des deux fêtes. Tout au plus convient-il de rechercher quels aspects de la venue du Fils de Dieu parmi les hommes chacune d'elles veut mettre davantage en lumière.
Le contenu des deux solennités a d'ailleurs évolué du fait que, dès la lin du IV° siècle, elles ont été reçues l'une et l'autre dans la majorité des Églises.
Que la Noël romaine ait honoré primitivement la naissance de Jésus à Bethléem, nul n'en saurait douter, tant les termes du Chronographe sont explicites. Mais à l'hommage rendu au Verbe fait chair et à sa Mère se joignait l'évocation des événements qui ont accompagné la naissance de Jésus : l'adoration des bergers et des mages, le massacre des enfants par Hérode. C'est ainsi du moins que, selon le témoignage d'Optat de Milève, l'Afrique, toujours très proche des usages romains, célébrait la Noël aux alentours de 360.
Lorsque, dans la seconde moitié du IV° siècle, Rome commença à fêter le 6 janvier, elle y transféra le souvenir de l'adoration des mages, qui devint le thème central de son Épiphanie, conservant seulement au 25 décembre la célébration de la nativité de Jésus avec l'adoration des bergers. Par contre, en adoptant la fête de Noël (entre 370 et 378 en Cappadoce, en 386 à Antioche, vers 430 en Égypte et au siècle suivant en Palestine), l'Orient lui a gardé sa physionomie primitive. Aujourd'hui encore l'Église byzantine chante aux vêpres du 24 décembre : "Chacune des créatures sorties de Toi T'apporte, Seigneur, son témoignage de gratitude : les anges leur chant ; les cieux l'étoile ; les mages leurs dons ; les bergers leur admiration ; la terre la grotte ; le désert la crèche ; et nous une Mère vierge".
L'Epiphanie a connu une évolution plus complexe, tant du fait de son passage d'Orient en Occident que du fait de la pénétration de Noël en Orient. Sur cette évolution, tous les historiens des rites sont d'accord. Ils divergent par contre au sujet du contenu primitif de la fête orientale de l'Épiphanie : tandis que l'Église de Jérusalem ne fêtait, le 6 janvier, que l'unique mystère de la nativité (comprenant l'adoration des bergers et des mages), l'Égypte y joignait le baptême du Seigneur, et saint Epiphane de Salamine évoque, à pareil jour, la nativité, l'adoration des mages et les noces de Cana. La commémoration de la naissance, du baptême et du premier miracle de Jésus remonte-t-elle aux origines de la fête ou bien est-elle le résultat de la fusion de plusieurs traditions différentes ?
Quoi qu'il en soit, l'Épiphanie est aujourd'hui, en Orient, la fête du baptême du Seigneur, à l'exclusion de tout autre aspect du mystère de l'incarnation ; seule l'Église arménienne monophysite, qui n'a jamais reçu Noël, célèbre le 6 janvier les trois mystères de la nativité, de l'adoration des mages et du baptême. Si la liturgie romaine voit avant tout dans l'Épiphanie la révélation du Christ aux païens, dont les mages sont les prémices, elle ne manque pas d'évoquer également le baptême de Jésus et le miracle de Cana dans les antiennes des laudes et des vêpres du 6 janvier, se réservant de célébrer le baptême du Seigneur dans une fête particulière, le dimanche suivant. Les formulaires liturgiques montrent avec un rare bonheur d'expression le lien qui noue la gerbe des trois mystères de l'Épiphanie, en développant le thème des noces du Christ et de l'Église.
La théologie liturgique de Noël.
L'Église ne célèbre dans sa liturgie qu'un seul mystère, le mystère pascal. Aussi, en instituant la fête de Noël, l'a-t-elle célébrée d'abord comme un simple anniversaire, un natale qui prenait place en tête des Depositiones martyrum. La date du 25 décembre ne tarda pas d'ailleurs à être tenue pour l'anniversaire strict de la naissance du Christ. Saint Augustin en était persuadé, quand il affirmait, vers 400, le caractère non sacramentel de Noël : "alors, dit-il, que Pâques réalise, chaque année, notre transitus de la mort à la vie dans la passion et la résurrection du Seigneur, Noël, simple anniversaire, n'est point célébré in sacramento".
Cinquante années plus tard, les sermons de saint Léon le Grand allaient révéler un approfondissement décisif de la théologie liturgique de Noël. Les formulaires liturgiques lui font depuis lors largement écho : Noël est un mystère. Mais il n'est pas un mystère particulier, distinct ou indépendant de celui de Pâques. Noël nous met d'abord en contact avec les prémices du sacramentum paschale : il contient, en effet, le commencement du mystère du salut, puisque le Christ a commencé à mériter pour nous dès le premier instant de son existence humaine. Noël nous prépare aussi à mieux comprendre Pâques, en nous montrant dans le Rédempteur le propre Fils de Dieu fait homme. De plus, Noël nous aide à vivre le mystère pascal, car c'est la naissance humaine du Fils de Dieu qui vient, pour ainsi dire, mettre à notre portée le modèle transcendant de notre filiation surnaturelle. C'est pourquoi la liturgie chante : Hodie illuxit nobis dies redemptionis novæ, reparationis antiquae, frucitatis aeternae (2e répons de l'Office des lectures).
La célébration de Noël.
La fête de Noël comporte, en Occident, une caractéristique unique : on y célèbre quatre fois la Messe. De plus la liturgie s'insère dans un ensemble de traditions populaires, dont la vénération de la Crèche est la plus marquante.
Les messes de Noël.
Saint Grégoire le Grand (+ 604) commence en ces termes son homélie
sur la Nativité : "La largesse du Seigneur nous permet aujourd'hui de célébrer la messe trois fois". C'est le plus ancien témoignage sur les trois messes, qui sont demeurées jusqu'à ce jour une des particularités de la liturgie de Noël : messe de la nuit, messe de l'aurore, messe du jour, ces trois messes étant précédées de la messe de la vigile, au soir du 24 décembre. Les trois messes de Noël étaient à l'origine propres à la liturgie papale, liée elle-même au culte local des divers sanctuaires de Rome.Initialement Noël ne comportait que la messe du jour, qui était célébrée à Saint-Pierre. Il en était encore ainsi au temps de saint Léon le Grand (+ 461). Mais, dès le lendemain du Concile d'Éphèse, qui avait reconnu à Marie le titre de Mère de Dieu (431), une basilique avait été érigée en l'honneur de celle-ci sur l'Esquilin, Sainte-Marie-Majeure. Au siècle suivant, on voulut avoir à Rome une réplique de la crèche de Bethléem et on construisit près de la basilique un oratoire de la Crèche. On souhaita de bonne heure célébrer dans cet oratoire à Noël une liturgie nocturne semblable à celle qui se déroulait à Bethléem. Telle est l'origine de la messe de la nuit. Précisons que les livres liturgiques n'ont jamais parlé de "Messe de minuit", selon l'expression populaire en France, mais de messe dans la nuit.
Le 25 décembre, on célébrait aussi à Rome l'anniversaire de sainte Anastasie dans sa basilique au pied du Palatin. C'était fête pour les autorités byzantines, qui résidaient près de cette basilique dans les anciens palais impériaux. Afin de les honorer, le pape allait célébrer la messe de sainte Anastasie avant de se rendre à Saint-Pierre pour la messe du jour. Au bout de quelque temps, tout en continuant à célébrer l'eucharistie dans la basilique du Palatin, le pape usa de formulaires ayant trait à la Nativité de Jésus et se contenta de faire mémoire de la sainte titulaire. Ce fut la messe de l'aurore. C'est ainsi que les livres liturgiques annonçaient successivement au soir du 24 décembre le rassemblement ou station à Sainte-Marie-Majeure, dans la nuit la station à Sainte-Marie-Majeure près de la Crèche, à l'aurore la station à Sainte Anastasie et le jour la station à Saint-Pierre. Au XI° siècle, cette dernière fut remplacée par une nouvelle station à Sainte-Marie-Majeure, qui devint ainsi pleinement la basilique de Noël.
Lorsque les livres de la liturgie papale se répandirent en Italie et au-delà des Alpes, lorsque surtout Charlemagne imposa l'usage dans son empire, les trois messes de Noël furent reçues par tout l'Occident. Mais il faut remarquer qu'elles devaient être célébrées selon l'horaire prévu. C'est un abus qui, à l'époque moderne, introduisit la célébration continue des trois messes.
Les formulaires liturgiques.
La liturgie de Noël culmine dans la lecture du Prologue de saint Jean à la Messe du jour : "Le Verbe s'est fait chair, il a habité parmi nous, et nous avons vu sa gloire" (Jn 1, 14). Toutes les autres lectures y préparent ou y font écho. Il en va de même des prières de la messe ou de l'office. Selon leurs genres littéraires respectifs, ils constituent une proclamation des dogmes de Nicée, d'Éphèse et de Chalcédoine, dans la lumière desquels la fête était née et s'est développée.
Si Dieu s'est fait homme, c'est pour que l'homme devienne participant de sa vie divine. Tel est l'enseignement de saint Léon le Grand à l'Office des lectures et celui de l'antienne O admirabile commercium du jour-octave. Tel est aussi l'objet de la prière formulée dans la collecte du jour :
Père, toi qui as merveilleusement créé l'homme et plus merveilleusement encore rétabli sa dignité, fais-nous participer à la divinité de ton Fils, puisqu'il a voulu prendre notre humanité.
L'octave de Noël.
Jusqu'au VII° siècle, ce fut le privilège de Pâques d'être célébré durant huit jours. On attribua alors une octave semblable à la Pentecôte en raison de la catéchèse des nouveaux baptisés. Noël ne pouvait prétendre à cet honneur. On dota pourtant la fête d'un jour octave. Celui-ci fut consacré d'abord à honorer la maternité divine de Marie, puis on y célébra la Circoncision du Seigneur. La fête mariale du I° janvier est antérieure à Rome à toutes les autres fêtes de Marie.
Les trois jours qui suivaient Noël étaient populaires, car on y fêtait successivement saint Etienne, saint Jean et les saints Innocents. Dans les églises et les monastères, ces jours étaient pleins de festivités en l'honneur des diacres (saint Étienne), des prêtres (saint Jean), des étudiants ou des jeunes clercs (saints Innocents). Au moyen âge, le 28 décembre était le jour de la célèbre "fête des fous".
Le dimanche après Noël (ou le 30 décembre), on célèbre dans la sainte Famille de Jésus, Marie et Joseph le modèle de vie familiale pour les chrétiens. La fête avait été instituée en 1921. Rattachée en 1969 à l'octave de Noël, elle a été pourvue de trois séries de lectures, dont les évangiles se référent à la Fuite en Égypte (A), à la Présentation au temple (B) et au Recouvrement de Jésus dans le temple par Marie et Joseph (C).
La Crèche, c'est-à-dire à la fois la grotte et la mangeoire où naquit Jésus, est la caractéristique par excellence de la fête de Noël en Occident.
La Crèche la plus vénérable est évidemment celle de Bethléem. Les premières générations chrétiennes n'avaient pas oublié son emplacement. Origène atteste, en 248, qu'" on montre à Bethléem la grotte dans laquelle est né Jésus et, dans cette grotte, la mangeoire dans laquelle il fut emmailloté". Sainte Hélène, la mère de l'empereur Constantin, transforma cette grotte et la recouvrit d'une basilique qui, après avoir subi quelques transformations au VI° siècle, existe encore aujourd'hui. Dans une homélie de Noël, saint Jérôme nous apprend que, de son temps, on avait enlevé la mangeoire d'argile pour en mettre une en argent : "Elle m'est autrement précieuse celle qui a été enlevée, dit-il, je ne condamne pas ceux qui ont agi de la sorte pour rendre hommage, mais j'admire le Seigneur, le créateur du monde, qui n'a pas voulu naître dans l'or ou l'argent mais dans l'argile".
Après la Crèche de Bethléem vient celle de Sainte-Marie-Majeure à Rome, qui remonte au VI° siècle. Les bois de la mangeoire qu'on y déposa passèrent, à partir du XII° siècle, pour la propre crèche de Jésus. Ils sont conservés sous l'autel principal de la basilique.
Les crèches de nos églises remontent aux jeux liturgiques exécutés dans les abbayes et les cathédrales pour donner une note plus populaire à l'office de la nuit de Noël. Postérieurs à l'Office du sépulcre de Pâques, ils témoignent de beaucoup d'ingéniosité et de spontanéité. Office des bergers, Procession des prophètes ou fête de l'âne (de Balaam), Office de l'étoile, Visite des bergers et des mages prirent de plus en plus d'ampleur du XI° au XIV° siècle. Ils comportaient tous la confection d'un édicule vers lequel s'avançaient les personnages pour adorer le Christ nouveau-né. Celui-ci devait être représenté par une statue de bois.
Pour la Noël de 1223, à Greccio, François d'Assise voulut faire mieux. Il installa une mangeoire emplie de paille près de laquelle il amena un âne et un bœuf. Avec la permission du pape il posa dessus un autel, et un prêtre y célébra la messe. François, qui était diacre, chanta l'évangile et fit un sermon qui toucha au cœur tout le peuple venu d'alentour. Après lui, les Franciscains se firent les promoteurs de la dévotion à la Crèche, comme ils le furent du Chemin de la Croix. Humbles évocations de la grotte de Bethléem, les crèches atteignirent à l'âge baroque une opulence qu'on retrouve dans les tableaux de la Nativité des peintres d'alors. Les santons de Provence en sont les héritiers.
La célébration de l'Epiphanie.
Alors que, le jour de Noël, les Églises d'Orient et d'Occident célèbrent fondamentalement le même événement, celui de la Nativité du Seigneur, elles témoignent, les unes et les autres, d'une originalité propre dans la célébration de l'Épiphanie.
L'Epiphanie en Occident.
Les deux thèmes de l'adoration des mages et du baptême du Seigneur sont l'objet de deux fêtes distinctes, celles de l'Épiphanie proprement dite et du Baptême du Seigneur.
L'Epiphanie : La solennité de l'Épiphanie est célébrée le 6 janvier là où ce jour est chômé. Sinon elle est fixée au dimanche qui suit le 1er janvier. Elle ne comporte aucun rite particulier. Autour de l'évocation de la venue des mages à Bethléem, c'est la vocation des nations païennes qu'elle célèbre : lesu, tibi sit gloria, qui apparuisti gentibus, chante la doxologie des hymnes.
La lecture du récit évangélique est précédée à la messe d'une page du livre de la Consolation d'Israël dans lequel le prophète entrevoit par avance le rassemblement de tous les peuples autour de Jérusalem (Is 60, 1-6). Dans la Liturgie des Heures, on poursuit la lecture de ce passage de l'Ancien Testament (Is 60, 1-22) auquel semble bien se référer explicitement l'évangéliste : "Tous les gens de Saba viendront, apportant l'or et l'encens". L'événement réalisé, saint Paul peut dévoiler la signification du mystère dont il était porteur : par l'annonce de l'Évangile, les païens sont associés dans le Christ au partage de la même promesse que les juifs (Eph 3, 2-6).
A l'office des lectures, saint Léon le Grand développe le même thème : "En la personne des trois mages, que tous les peuples adorent le Créateur de l'univers", et c'est lui encore que reprennent les diverses prières : "Aujourd'hui, dit la préface, tu as dévoilé dans le Christ le mystère de notre salut pour que tous les peuples en soient illuminés".
Le Baptême du Seigneur : Quand l'Épiphanie fut dotée, ici et là, d'une octave, à l'instar de Noël (à partir de la fin du VIII° siècle), on rattacha au jour octave la lecture du récit du baptême du Seigneur. De nombreux missels médiévaux devaient y ajouter une lecture prophétique propre. L'Office se vit attribuer lui-même les antiennes byzantines Veterem hominem, que Charlemagne avait fait traduire en latin après les avoir entendus chanter par des moines grecs. Avec les liturgies françaises du XVIII° siècle, le jour octave de l'Épiphanie devint la fête du Baptême du Seigneur et on composa pour elle un ensemble de formulaires propres.
Elle devait être insérée dans le Calendrier romain de 1960. En 1969, elle a été fixée au dimanche après le 6 janvier ou au lendemain, quand ce dimanche est celui de l'Épiphanie.
La Messe est pourvue de neuf lectures, réparties sur les trois années A, B, C. La préface, ainsi que la collecte et la prière après la communion, sont des compositions nouvelles. La liturgie des Heures comporte a nouveau les antiennes Veterem hominem (1° vêpres, office des lectures, louanges du matin) : Baptizatur Christus, et sanctificatur omnis mundus, dit l'antienne du Benedictus, qui résume ainsi le sermon de saint Grégoire de Naziance pour la Fête des lumières, lu en ce jour.
L'Epiphanie en Orient.
Dans tout l'Orient chrétien, de l'Éthiopie à la Russie, le rite caractéristique de l'Épiphanie est la bénédiction des eaux au soir du 5janvier en mémoire du Baptême du Seigneur. Au début du V° siècle, Constantinople demeurait fidèle au baptême des catéchumènes dans la Nuit sainte de Pâques, signifiant ainsi qu'être baptisé, c'est être plongé dans la mort et la résurrection du Christ (Rom 6). Bientôt cependant le baptême y passa de Pâques à l'Épiphanie car, descendant dans le Jourdain, le Christ a sanctifié les eaux pour en faire des sources de vie éternelle. Plus tard, les baptêmes d'adultes se firent rares et on baptisa les enfants à la maison, mais on tint à conserver la bénédiction de l'eau baptismale à l'Epiphanie. Au rite byzantin, on lit d'abord trois passages du livre d'Isaïe (Is 35, 1-9 ; Is 55, 1-3 ; Is 12, 3-6), puis quelques versets de la I° Lettre aux Corinthiens (I Cor 10, 1-4) et le récit du baptême de Jésus en Marc (Mc 1, 9-11). Les lectures sont suivies d'une litanie diaconale et d'une ample prière sacerdotale attribuée à saint Sophrone de Jérusalem. Le prêtre plonge ensuite par trois fois la croix dans l'eau avant de la placer sur un plateau orné de fleurs. Chacun s'approche alors, baise la croix, est aspergé avec l'eau sainte et en boit une gorgée. Après l'office on peut puiser dans le récipient et emporter une réserve d'eau à la maison.
En Éthiopie, l'Épiphanie attire des milliers de pèlerins à Axoum. Le prêtre bénit les eaux du grand réservoir qui alimente la ville et tous s'y baignent pour honorer le baptême du Christ.
La présentation du Seigneur.
Quarante jours après la Nativité du Seigneur la fête de sa Présentation au Temple vient conclure les festivités de Noël-Épiphanie.
Origines et développement de la fête.
Le Quarantième jour après la Noël-Épiphanie (Quadragesima de Epiphania) était célébré à Jérusalem vers 386, comme l'atteste Egérie. La procession des cierges y fut ajoutée vers 450. Au VI° siècle, la fête se répandit en Syrie et elle fut reçue à Constantinople sous le nom de Rencontre. C'est "la Rencontre de notre grand Dieu et Sauveur Jésus Christ, lorsque le juste Syméon le reçut dans ses bras". À l'origine elle y comporta aussi la procession.
Rome accueillit cette fête dans la seconde moitié du VII° siècle. Le Sacramentaire grégorien lui conserve le titre d'Ypapanti. Le Liber Pontificalis parle du dies S. Simeonis, quod Ypapanti Groeci appellant. Mais, au milieu du VIII° siècle, une nouvelle appellation se fit jour en pays francs, celle de Purification de sainte Marie. Pendant deux siècles les deux appellations se concurrencèrent, souvent dans les mêmes régions, puis la seconde prévalut. Les liturgies françaises du XVIII° siècle lui substituèrent le titre de Présentation du Seigneur. Il a été adopté par le Calendrier romain en 1969.
A la fin du VII° siècle, le pape Sergius I° (687-701) introduisit à Rome l'usage de faire précéder la messe du 2 février, du 25 mars, du 15 août et du 8 septembre, d'une procession qui, partant du Forum, se dirigerait vers Sainte-Marie-Majeure. Celle du 2 février avait lieu à l'aurore. Tout le peuple y tenait des cierges en mains, mais la procession revêtait pourtant un certain caractère pénitentiel. Celui-ci s'exprimait non dans les chants, mais dans les vêtements noirs que revêtaient le pape et ses diacres. Il en allait d'ailleurs ainsi à Constantinople, où l'empereur marchait pieds nus.
Faut-il y voir une intention de réparation pour les cortèges licencieux qui se déroulaient en février dans la Rome païenne ou le vestige d'une supplication en quelque calamité ? Il est difficile de le dire. Quoi qu'il en soit, jusqu'en 1970, le prêtre et ses ministres ont porté des vêtements violets dans la procession, dite "de la Chandeleur" en raison des cierges qu'on y porte. Quant à la bénédiction des cierges, elle apparaît seulement au X° siècle en pays germaniques et elle n'est pas attestée à Rome avant le XII°. Pour la procession l'Antiphonaire de la messe donnait des chants byzantins, qu'on exécutait encore en grec aux VIII°-IX° siècles dans les pays francs, bien qu'ils fussent aussi traduits en latin : Ave gratia plena, Adorna.
La célébration de la Présentation.
La célébration de la Présentation du Seigneur demeure caractérisée par la procession des cierges, que précède leur bénédiction. Elle s'ouvre sur une monition qui souligne le caractère d'anamnèse de cette marche vers la maison de Dieu : évocation de la rencontre de Jésus et de Syméon, elle conduit à la rencontre de l'assemblée des chrétiens avec son Seigneur dans la fraction du pain, en attendant l'ultime rencontre dans la gloire. La procession se déroule au chant du Nunc dimittis. Malheureusement le répons Adorna a disparu du texte du Missel, mais on le trouve toujours dans le Graduale romanum et, sous une forme abrégée, dans la liturgie des Heures. Trois des hymnes latines en constituent une paraphrase.
Alors que les formulaires du Missel ont toujours célébré la Présentation du Seigneur, ceux du Bréviaire honoraient, jusqu'à ces derniers temps, la Purification de Marie. Depuis 1970, ils sont consacrés, eux aussi, à la Présentation. On y lit, entre autres, un sermon de saint Sophrone de Jérusalem sur la procession des lumières : "Allons tous à la rencontre de Dieu", et une paraphrase du répons Adorna dans l'hymne de Pierre Abélard, qui est chantée le matin : Adorna, Sion, thalamum.
Comme le terme Epiphania qu'il traduit parfois, le terme Adventus est un mot chrétien d'origine profane. D'un point de vue cultuel il signifiait la venue annuelle de la divinité dans son temple pour visiter ses fidèles : le dieu, dont la statue était alors proposée au culte, était censé demeurer ainsi au milieu des siens tant que durait la solennité. L'étiquette de cour désignait pareillement la première visite officielle d'un personnage important lors de son avènement ou de son entrée en charge. C'est ainsi que des monnaies de Corinthe perpétuent le souvenir de l'Adventus Augusti (Néron) et que le Chronographe de 354 désigne le jour de l'avènement de Constantin comme l'Adventus Divi. Dans les ouvrages chrétiens des premiers siècles, et spécialement dans la Vulgate, Adventus devint le terme classique employé pour désigner la venue du Christ parmi les hommes : son avènement dans la chair, inaugurant les temps messianiques, et son avènement glorieux, qui couronnera l'oeuvre rédemptrice à la fin du monde. Adventus, Natale, Epiphania expriment donc la même réalité fondamentale. Comment le terme Adventus en est-il venu à désigner la période liturgique préparatoire à Noël ? Seule l'histoire peut nous le faire savoir.
Les origines de l'Avent liturgique.
La préparation à Noël en Occident.
Avant de faire l'histoire de l'Avent romain, qui commence au VI° siècle, il faudrait parler d'une préhistoire de l'Avent en Gaule et en Espagne. Ces régions semblent avoir perçu, dès la fin du IV° siècle et dans le cours du V° le besoin d'une préparation ascétique aux fêtes de Noël-Epiphanie. D'une durée de trois semaines, elle fut sans doute liée initialement à la préparation au baptême administré à l'Epiphanie. On ne peut faire fonds sur un texte attribué à saint Hilaire comme le témoin le plus ancien du "carême de Noël". Mais dès 380, le Concile de Saragosse prescrit aux fidèles d'être assidus à l'église du 17 décembre à l'Épiphanie. Ascèse, prière, assemblées plus fréquentes, telles sont les premières caractéristiques du temps de préparation à Noël. Cette discipline devait se préciser en Gaule dans le cours du V° siècle, où nous voyons Perpétue de Tours (+ 490) instituer un jeûne de trois jours par semaine allant de la Saint-Martin à la Nativité.
L'Avent romain apparaît seulement dans la seconde moitié du VI° siècle avec les sacramentaires et les lectionnaires qui nous en ont transmis les formulaires liturgiques. Il importe de souligner le fait qu'à Rome "l'Avent fut, dès son origine, une institution liturgique, alors que partout ailleurs il eut des considérations ascétiques pour point de départ et pour normes de son évolution". Les formulaires des six, puis des quatre semaines préparatoires à Noël eurent quelque peine à trouver leur place dans le cycle annuel : au Sacramentaire gélasien ancien les Orationes de adventu Domini se trouvent après le commun des saints à la fin du livre deuxième intitulé De natalicus sanctorum ; c'est également à la fin du sanctoral que le Sacramentaire grégorien donne les Orationes de adventu et le Lectionnaire d'Alcuin les péricopes des dimanches ante natale Domini. Il faut attendre les graduels et antiphonaires des VIII°-IX° siècles pour trouver les messes de l'Avent au début du cycle.
La Constitution liturgique du II° Concile du Vatican semble inviter à faire de l'Avent le terme du cycle dominical, lorsqu'elle déclare que l'Église "déploie tout le mystère du Christ pendant le cycle de l'année, de l'incarnation et la nativité jusqu'à l'ascension, jusqu'au jour de la Pentecôte, et jusqu'à l'attente de la bienheureuse espérance et de l'avènement du Seigneur".
Le sens de l'Avent romain.
L'étude des formulaires de la messe et de l'office permet de saisir le sens précis que les papes du Vl° et du VII° siècles ont voulu donner au temps de l'Avent. Il est d'abord, selon la conception primitive des Gaules, un temps de préparation à la solennité de l'Adventus Domini : ut hoec divina subsidia adfrsta ventura nos praeparent. Mais, comme la fête de Noël n'a cessé de recevoir une importance accrue durant le haut moyen âge, l'Avent se présente aussi comme un temps d'attente : dans l'attente joyeuse de la fête de la Nativité, il oriente surtout les chrétiens vers le retour glorieux du Seigneur à la fin du monde. Le meilleur symbole de l'Avent vécu dans cette perspective est peut-être l'"Étimasie", le trône vide du Pantocrator, que représentent Si souvent les mosaïques de Rome et de Ravenne. Le vieux vocable païen d'adventus est dès lors entendu au sens biblique et eschatologique de Parousie. L'attente chrétienne trouve son expression spontanée dans les textes prophétiques inspirés par l'attente du Messie : Isaïe et Jean-Baptiste sont à Rome les deux grandes voix de la liturgie de l'Avent.
La préparation à Noël en Orient.
"Aucune liturgie orientale n'a constitué un cycle d'Avent comparable à celui de la liturgie romaine, c'est-à-dire qui prenne l'attente messianique dans toute son ampleur et son indétermination". On ne peut parler en Orient que de préparation à la fête de Noël au sens où on l'entendait en Gaule au V° siècle. Deux rites donnent un relief plus marqué à cette préparation : le rite byzantin et le rite syrien.
De la liturgie byzantine retenons surtout la commémoration, au dimanche qui précède Noël, de "tous les Pères qui dans les âges furent agréables à Dieu, depuis Adam jusqu'à Joseph l'époux de la Très Sainte Mère de Dieu" Tous les saints de l'Ancienne Alliance y sont invités à"mener la danse pour la Nativité du Sauveur".
Quant au rite syrien, il intitule les semaines qui précèdent Noël les Semaines des Annonciations. Elles sont cinq chez les Syriens Occidentaux et quatre chez les Orientaux, qui évoquent successivement l'Annonciation à Zacharie, l'Annonciation à Marie suivie de la Visitation, la Nativité de Jean-Baptiste et l'Annonciation à Joseph.
La célébration de l'Avent.
Les quatre semaines de l'Avent comportent deux étapes : la première va du I°' Dimanche au 16 décembre, la seconde du 17 au 24, cette dernière étant plus directement orientée vers les fêtes de Noël. Les deux préfaces du temps de l'Avent résument bien chacune de ces étapes. La première évoque les deux avènements du Christ ; la seconde célèbre
celui que tous les prophètes avaient chanté, celui que la Vierge attend avec amour, celui dont Jean Baptiste a proclamé la venue et révélé la présence au milieu des hommes.
Chaque jour est doté, au Missel, d'une collecte propre empruntée aux anciens sacramentaires. La Liturgie des Heures offre, avec ses antiennes propres, un ensemble de textes patristiques qui constitue une introduction de choix à la spiritualité de l'Avent.
La célébration de l'eucharistie.
Dans la célébration de l'eucharistie au temps de l'Avent il convient de souligner, en premier lieu, la manière dont sont organisés les lectures dominicales,
Les lectures dominicales : La première lecture fait prendre contact, au cours des trois années, avec les principales prophéties messianiques : les oracles d'Isaïe et les additions qu'ils ont reçus au temps de l'exil, ceux de Baruch et de Sophonie. De toutes ces prophéties les plus importantes sont celles du IV° dimanche. Elles annoncent qu'une femme enfantera un descendant de David, qui sera l'Emmanuel, Dieu avec nous (Isaïe, Michée, Nathan). Les évangiles évoquent chaque année le même thème. Le 1° dimanche est celui de l'attente de la venue du Seigneur "Veillez", dit Jésus. Le II° et le III° sont ceux de Jean-Baptiste. Le IV° dimanche est celui de l'annonce à Marie (B), de l'annonce à Joseph (A) et de la Visitation (C).
La lecture apostolique montre comment les prophéties ont été accomplies en Jésus. Elles annoncent, à leur tour, la venue du Seigneur, jour de salut pour tous les peuples et jour de joie pour ceux qui l'auront attendue avec amour.
Les prières : Dans les prières s'entrecroisent les deux thèmes de la célébration de la venue du Seigneur dans la chair et de son retour en gloire :
Accorde-nous, Seigneur, d'attendre sans faiblir la venue de ton Fils, pour qu'au jour où il viendra frapper à notre porte, il nous trouve vigilants dans la prière, heureux de chanter sa louange,
dit la collecte du premier lundi. Au cours de la dernière semaine, on évoque souvent la Vierge Marie :
Par le signe merveilleux de la Vierge qui enfante tu as fait connaître au monde, Seigneur, la splendeur de ta gloire,
dit la collecte du 19 décembre. Le IV° dimanche, qui est celui des annonciations (évangile), la prière sur les offrandes demande que l'Esprit saint,
dont la puissance a fécondé le sein de la Vierge Marie, consacre les offrandes posées sur cet autel.
La Liturgie des Heures.
Dans la lecture biblique Isaïe tient une place prépondérante avec, en prolongement, le Livre de la consolation d'Israël, aussi bien selon le cursus annuel que selon celui de deux ans.
En ce qui concerne les lectures patristiques, bien que l'Orient ne connaisse pas l'Avent, on fait appel largement aux Pères grecs pour l'Office des lectures, mais ce sont les Occidentaux qui offrent l'apport principal, de saint Cyprien à saint Jean de la Croix, en passant par l'Imitation de Jésus Christ. On trouve, comme il convient, les textes classiques, comme le parallèle entre Eve et Marie de saint Irénée et le commentaire du Missus est de saint Bernard. Les lectures sont suivies des répons traditionnels, tel le répons Aspiciens a longe du I° dimanche.
Parmi les antiennes, celles qui accompagnent le Magnificat du 17 au 23 décembre, les "Grandes Antiennes O", tiennent le premier rang. Ces antiennes, que l'Église romaine chantait déjà au temps de Charlemagne, ne sont pas seulement une synthèse du plus pur messianisme de l'Ancien Testament : à travers les images anciennes de la Bible, elles énumèrent les titres divins du Verbe incarné et leur Veni est porteur de toute l'espérance actuelle de l'Église. En elles la liturgie de l'Avent atteint sa plénitude.
L'annonciation du Seigneur.
L'Annonciation du Seigneur est l'objet d'une double célébration, l'une au temps de l'Avent, l'autre le 25 mars 57.
L'Annonciation en Avent.
Les liturgies d'Occident célèbrent toutes, au cours de l'Avent, l'Annonciation du Seigneur. En 656, un Concile de Tolède décidait de fixer la fête au 18 décembre, sicut mos est. La liturgie ambrosienne la célèbre le dernier dimanche de l'Avent. Jusqu'en 1970, la liturgie romaine lisait, le mercredi des Quatre Temps de décembre, l'évangile Missus est et celui de la Visitation le vendredi. Depuis lors, elle lui consacre le IV° dimanche, à l'instar de Milan, ainsi que les lectures des 18, 20 et 21 décembre, avec plusieurs oraisons des derniers jours avant Noël.
La solennité du 25 mars.
La solennité de l'Annonciation au 25 mars apparaît à Rome dans la seconde moitié du VIII° siècle sous le titre d'Annunciatio Domini. La piété mariale devait en faire l'Annuntiatio beatae Mariae Virginis jusqu'à ce qu'elle retrouve, en 1969, son appellation primitive. Bien que la tradition byzantine n'admette aucune fête en carême en dehors du samedi, le Concile in Trullo (692) fit une exception pour l'Annonciation, dont on fait mémoire même durant le triduum pascal.
Les textes de la messe et de l'office célèbrent le mystère de l'incarnation du Verbe de Dieu en Marie. Le verset du psaume Tune dixi : ecce venio en constitue le leitmotiv (antienne d'entrée, psaume, 2° lecture). La lecture de la lettre de saint Léon le Grand à Flavien, patriarche de Constantinople, développe la théologie de l'Incarnation que le Concile de Chalcédoine devait ériger en dogme : "De même que Dieu n'est pas altéré par sa miséricorde, de même l'homme n'est pas anéanti par sa dignité". Mais, en contemplant le Verbe fait chair, l'assemblée qui célèbre n'oublie pas celle qui "l'accueille par la foi et qui le porte avec tendresse" (Préface).