Origines.

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La Cène du Seigneur.

 

La journée du jeudi saint appartient à deux temps liturgiques différents : jusqu'à l'heure de Vêpres elle est le dernier jour du carême; avec la Messe du soir in Cena Domini elle ouvre le triduum pascal. Aussi traitera-t-on de la consécration des Saintes Huiles dans la section relative au carême.

Structure

Antienne d'ouverture :

Bien que nous soyons dans le Triduum Pascal, nous chantons le Gloria.

Oraison :

Liturgie de la parole : Commune aux trois années, trois lectures.

Après l'homélie, le prêtre peut procéder au lavement des pieds de quelques hommes choisis à cet effet. Pendant ce temps, on chante des cantiques appropriés à ce geste d'amour fraternel.

Oraison sur les offrandes :

Préface : au choix de l'Eucharistie

Antienne de communion :

L'Eglise invite les fidèles à communier sous les deux espèces.

Oraison finale :

Ensuite, tandis qu'on chante des hymnes eucharistiques, le Saint-Sacrement est porté en procession au reposoir, où les fidèles sont invités à venir l'adorer dans la soirée jusqu'à minuit. Pendant l'adoration, on fait la lecture du discours après la Cène (Jn )

Historique

Aux origines.

La Messe in Cena Domini est attestée à Jérusalem au temps d'Égérie. On célèbre, dit-elle, deux messes en ce jeudi : l'une au milieu de l'après-midi dans la basilique du Martyrium, puis l'autre, aussitôt après, au Calvaire, "où tout le monde communie". La première était la messe quadragésimale de clôture du jeûne, la seconde, célébrée exceptionnellement au pied de la Croix, commémorait l'institution du sacrifice eucharistique.

De nombreuses Églises d'Occident connaissaient, à la fin du IV° siècle, cette double eucharistie du jeudi saint et les heures de célébration variaient selon les traditions. Au dire de saint Augustin, en Afrique, certains célébraient la messe le jeudi matin, pour permettre à ceux qui le désiraient de rompre le jeûne après avoir pris le bain pascal ; d'autres le faisaient l'après-midi à l'heure habituelle des jours du carême ; d'autres encore le soir, et même certains la célébraient après le souper pour imiter de plus près la Cène du Seigneur. Augustin ne veut condamner aucune de ces pratiques, même s'il estime personnellement ne pouvoir enfreindre la loi du jeûne eucharistique.

A Rome au VII° siècle.

A Rome, au IV° siècle, le jeudi saint était avant tout le jour de la réconciliation des pénitents, comme en témoigne saint Jérôme, et il n'était pas question de la messe in Cena Domini. Au milieu du V° siècle, saint Léon le Grand n'y fait encore aucune allusion.

Au VI° siècle, la situation a évolué. Dans les églises desservies par des prêtres on trouve deux messes, celle du matin clôturant le jeûne du carême et celle du soir en mémoire de la Cène. Au Latran, le pape célèbre à midi la Messe In Cena Domini au cours de laquelle il consacre le Chrême et bénit l'huile des malades et l'huile d'exorcisme. Cette messe commémorative de la Cène, comme d'ailleurs celle que célèbrent les prêtres le soir, ne comporte pas de liturgie de la Parole. Elle commence avec l'offertoire. Le Sacramentaire gélasien devait réunir les deux traditions papale et presbytérale, en offrant trois messes pour le jeudi saint, celles de la réconciliation des pénitents, de la confection du Chrême et du mémorial de la Cène. Cette dernière commençait toujours avec la prière sur les offrandes. Ajoutons qu'en ce jour le pape lavait les pieds de ses familiers et que chaque clerc en faisait autant dans sa propre maison. On continuait enfin, comme aux siècles précédents, à célébrer la réconciliation des pénitents.

Évolution ultérieure.

En Gaule, on fêtait dès le V° siècle, au soir du jeudi saint, le Natale Calicis, après avoir dit une messe matinale. Quand, à la fin du VIII° siècle, la liturgie romaine eut supplanté les usages locaux, l'unique messe du sacramentaire papal s'imposa, après avoir été dotée entre temps d'une prière d'ouverture et des deux lectures destinées à se perpétuer jusqu'à nos jours. Dans les cathédrales, la confection du Chrême et la bénédiction des huiles y prenaient place.

L'heure de la célébration de cette messe unique allait varier au cours des siècles entre la troisième et la neuvième heure, jusqu'à ce que l'interdiction d'offrir le sacrifice après midi par saint Pie V imposât la célébration matinale. Désormais toute la journée du jeudi faisait partie du triduum sacrum avec pour conséquence l'éviction du jour de Pâques, contrairement à la tradition théologique et liturgique de l'Église ancienne.

Spiritualité

L'Ordo de 1955 a profondément modifié la physionomie du jeudi saint, telle que l'avait dessinée la piété de l'époque post-tridentine. La messe étant alors célébrée le matin, la journée du jeudi était consacrée à l'adoration de l'eucharistie. Le rite secondaire du transfert du Corps du Christ au lieu de sa réservation jusqu'au lendemain avait pris une importance disproportionnée, l'autel de la Réserve était devenu le "reposoir", que l'âge baroque s'était plu à orner d'une profusion de luminaire et de fleurs. La "visite des reposoirs" d'une même ville était de tradition pour les personnes pieuses et les enfants.

L'Ordo de 1955.

En 1955, la Messe en mémoire de la Cène retrouve sa place initiale au soir du jeudi saint. La journée du jeudi saint n'était plus marquée dès lors, en dehors des cathédrales, par aucun rite spécial, sinon le chant de l'office choral avec la lecture des Lamentations attribuées au prophète Jérémie. Dans sa cathédrale, l'évêque, entouré des prêtres, célébrait au cours de la matinée la messe chrismale, dont les formulaires avaient été puisés dans le Sacramentaire gélasien. Pour souligner le lien établi par le Seigneur lui-même entre l'institution de l'eucharistie et le commandement du service fraternel, le nouvel Ordo proposa de célébrer le lavement des pieds après la liturgie de la parole de la messe du soir. Quant au lieu de la Réserve eucharistique, il ne devrait recevoir désormais qu'une décoration discrète. Les fidèles pourraient y prolonger leur adoration jusqu'au milieu de la nuit.

L'Ordo de 1970.

Le Missel de 1970 conserva l'ensemble des innovations de 1955. Son effort de rénovation porte sur les textes auxquels on n'avait pas touché quinze ans plus tôt. Les deux lectures de saint Paul et de l'évangile de saint Jean sont précédées par le récit de la manducation de l'agneau au soir de la Pâque juive (Ex 12, 1-14) Cette page de l'Ancien Testament, qui tient une place majeure dans la catéchèse pascale des Pères aux tout premiers siècles, constitue désormais le prologue des lectures bibliques du sacratissimum triduum En ce qui concerne les prières, la collecte est nouvelle, les autres proviennent de sources anciennes. La prière sur les offrandes est celle du Missel antérieur, au 9° dimanche après la Pentecôte, et la prière après la communion est gallicane. La préface, empruntée au Missel parisien de 1738, avait été composée à partir des missels gallicans du VIII° siècle. Mais, plus que les textes nouveaux, il y a deux rites qui, sans être propres au jeudi saint, peuvent en modifier profondément la célébration. Ce sont la concélébration de tous les prêtres de la paroisse et la possibilité offerte aux fidèles de communier à la coupe du Seigneur, comme le firent les Apôtres.

Nous célébrons le jour où l'Eucharistie a été instituée. Toutes les oraisons seront donc centrées sur ce mystère d'Amour.

Commentaire des textes :

Evangile [Jn 13, 1-15]

Si donc moi, le Seigneur et Maître, je vous ai lavé les pieds, vous aussi vous devez vous laver les pieds les uns les autres.

1° Lecture [Ex 12, 1…14]

Vous choisirez un agneau sans défaut, un mâle, âgé d'un an. Dans toute l 'assemblée de la communauté d'Israël, on l'immolera au coucher du soleil.

Psaume 115

J'élèverai la coupe du salut en invoquant le nom du Seigneur.

2° Lecture [1Co 11, 23-26]

Ainsi donc, à chaque fois que vous mangez ce pain et que vous buvez à cette coupe, vous proclamez la mort du Seigneur, jusqu'à ce qu'il vienne.

Commentaire des oraisons

Antienne d'ouverture :

La croix doit être notre joie, car en elle nous avons le salut, la vie, la résurrection, la libération des péchés.

Oraison :

Nous célébrons l'institution de l'Eucharistie, sacrement de l'Amour du Christ ; nous demandons d'en goûter les fruits, que sont la charité et la vie.

Oraison sur les offrandes :

Nous célébrons l'institution de l'Eucharistie. Mais c'est à chaque fois que nous célébrons une messe, nous en faisons un mémorial : à chaque fois, c'est le mystère de notre Rédemption qui s'accomplit.

Préface :

La célébration de l'Eucharistie, ce que le Christ lui-même nous a prescrit de faire, perpétue son sacrifice. Nous en reconnaissons les fruits : nous sommes fortifiés par son corps et purifiés par son sang afin d'être tous rassemblés dans la même foi et la même charité. Alors nous pourrons connaître la vie du Royaume qui commence à travers la communion à ce saint sacrement.

Oraison finale :

Nous communion aujourd'hui à l'Eucharistie du Christ ; elle est pour nous préfiguration du festin éternel dans le Royaume auquel nous aspirons participer.

Commentaire de l'office

La liturgie des Heures demeure jusqu'aux Vêpres celle d'un jeudi du carême, sans autre caractéristique propre que la lecture d'un passage de l'Homélie pascale dans laquelle Méliton de Sardes célèbre avec lyrisme l'immolation de l'Agneau sans défaut et sans tache.

Quand on participe à la messe, on ne dit pas les vêpres.

Textes liturgiques

Préface

De l'Eucharistie I

Vraiment, il est juste et bon de te rendre gloire,

de t'offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu,

à toi, Père très saint, Dieu éternel et tout-puissant,

par le Christ notre Seigneur.

C'est lui, le prêtre éternel et véritable,

qui a apprit à ses disciples

comment perpétuer son sacrifice ;

il s'est offert à toi

en victime pour notre salut ;

il nous a prescrit

d'accomplir après lui cette offrande

pour célébrer son mémorial.

Quand nous mangeons sa chair immolée pour nous,

nous sommes fortifiés ;

quand nous buvons le sang qu'il a versé pour nous,

nous sommes purifiés.

C'est pourquoi,

avec les anges et tous les saints,

nous proclamons ta gloire,

en chantant (disant) d'une seule voix : Saint'...

Ou

De l'Eucharistie II

Vraiment, il est juste et bon de te rendre gloire,

de t'offrir notre action de grâce, toujours et en tout lieu,

à toi, Père très saint, Dieu éternel et tout-puissant,

par le Christ notre Seigneur.

Dans le dernier repas qu'il prit avec ses Apôtres,

afin que toutes les générations

fassent mémoire du salut par la croix,

il 'est offert à toi, comme l'Agneau sans péché,

et tu as accueilli son sacrifice de louange.

Quand tes fidèles communient à ce sacrement,

tu les sanctifies

pour que tous les hommes,

habitant le même univers,

soient éclairés par la même foi

et réunis par la même charité.

Nous venons à la table d'un si grand mystère

nous imprégner de ta grâce

et connaître déjà la vie du Royaume.

Voilà pourquoi le ciel et la terre t'adorent ;

ils chantent le cantique de l'Alliance nouvelle,

et nous-mêmes,

unissant notre voix à celle des anges,

nous t'acclamons : Saint'

Communicantes

Prière Eucharistique II

Toi qui es vraiment saint,

toi qui es la source de toute sainteté,

nous voici rassemblés devant toi,

Et, dans la communion de toute l'Eglise,

nous célébrons le jour très saint

où notre Seigneur Jésus Christ fut livré pour nous.

Par lui, notre Rédempteur est Sauveur,

que tu as glorifié,

Dieu notre Père nous te prions :

Prière Eucharistique III

C'est pourquoi nous voici rassemblés devant toi

Et, dans la communion de toute l'Eglise,

nous célébrons le jour très saint

où notre Seigneur Jésus Christ fut livré pour nous.

Par lui, notre Rédempteur est Sauveur,

que tu as glorifié,

Dieu tout-puissant, nous te supplions

de consacrer toi-même

les offrandes que nous apportons :

Collecte

Tu nous appelle, Dieu notre Père, à célébrer ce soir la très Cène où ton Fils unique, avant de se livrer lui-même à la mort, a voulu remettre à son Eglise le sacrifice nouveau de l'Alliance éternelle ; fais que nous recevions de ce repas qui est le sacrement de son amour, la charité et la vie.

Par Jésus Christ.

Oraison sur les offrandes

Seigneur, accorde-nous la grâce de vraiment participer à cette Eucharistie ; car à chaque fois qu'est célébré ce sacrifice en mémorial, c'est l'œuvre de notre Rédemption qui s'accomplit.

Par Jésus.

Oraison après la communion

Nous avons repris des forces, Dieu tout-puissant, en participant ce soir à la Cène de ton Fils ; accorde-nous d'être un jour rassasiés à la table de son Royaume éternel.

Lui qui règne.

Approfondissement

1. Le Jeudi Saint à Jérusalem au IV° siècle.